Un beau perdant

Le sport, ce n’est pas que l’opium du peuple, pour reprendre la critique radicale du par ailleurs très excellent Jean-Marie Brohm. Au milieu du sport-business, des Lance Armstrong qui se rachètent une conduite sur les plateaux télé ou des statues de Zidane qui mettent des coups de boule devant Beaubourg, voilà une petite histoire comme je les aime.

Le décor est d’une banalité immense: le 2 décembre 2012, une course de fond en Espagne, comme il s’en court beaucoup chaque week-end.
La première place se joue entre les deux hommes de la photo: Iván Fernández Anaya, en dossard vert, Abel Mutai, en bleu et blanc. Le premier est un petit jeune qui monte, le second un médaillé olympique aux derniers JO. Des compétiteurs, des vrais, donc.
Sur la dernière ligne droite, le suspense est léger, le Kényan est devant, il va gagner. D’ailleurs, il s’arrête… 10 mètres avant la ligne. Une erreur, peut-être dûe à un marquage au sol peu visible.
Un sportif normal en aurait profité pour lui griller la priorité et lui passer devant au dernier moment. Ca aurait tourné sur youtube, fait plein de clics sur les sites sportifs, trouvé sa place dans les bêtisiers de l’année 2012 et tout aurait été pour le mieux dans le meilleur des mondes sportifs.

Ca ne s’est pas terminé de cette manière.

Le p’tit basque aux dents longues est arrivé derrière lui mais ne l’a pas doublé. Il lui a tapé sur l’épaule et lui a montré la ligne. Il a du essayer de baragouiner quelque chose en anglais ou en espagnol pour lui faire comprendre son erreur. Ca a du prendre quelques secondes. Il aurait pu changer d’avis trois fois. Le kenyan est finalement reparti, pour finir par gagner la course qu’il aurait pu perdre stupidement si un peu de fair play n’était pas venu gripper l’esprit de compétition de l’espagnol.

Ce n’est qu’une course, ce n’est qu’une poignée de secondes. Ca reste essentiel. Un peu de décence et de correction dans un monde qui en manque tant. J’aurais aimé qu’un JT français ouvre là-dessus pour tous les mômes qui transpirent en préparant leur cross inter-école se rendent compte que, même à haut-niveau, le sport, c’est aussi ça.

 

Sources: Article de « El pais » du 14 décembre 2012, via la page Facebook de l’ONG maltaise Kellimi. Photo: Calleja/Diaro de Navarra

1 commentaire

  1. J’adore cette histoire ! Merci Fred de l’avoir raconte et diffusée,,,dommage qu elle ne soit apparue que si peu. Mais entre le Mali et les declarations de l’OCDE….c est dur a placer…Biz !

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